Lyon, le 30 janvier 2007
Madame, Monsieur,
J’ai bien pris note de votre pétition relative à la réforme du Compte de soutien à l’Industrie des Programmes Audiovisuels (COSIP), créé en 1986 et réglementé par les décrets n° 95-110 du 2 février 1995 et 98-35 du 14 janvier 1998 modifiés en 2004, dont l’objectif est de favoriser la production d’oeuvres audiovisuelles par des entreprises de production établies en France, destinées à être diffusées sur les chaînes de télévision françaises.
Soyez assuré(e) que cela a retenu toute mon attention et je vous en remercie.
Je me dois de vous rappeler que la création audiovisuelle et cinématographique française n’existe que grâce à un système de financement spécifique organisé par l’Etat. Sans cette réglementation appropriée, il n’y aurait plus de création audiovisuelle et cinématographique en France. C’est la raison pour laquelle il est vital d’adapter ce modèle à l’ère numérique en garantissant l’avenir du financement et du développement de la création française. Ne pas agir serait paradoxal alors que notre modèle est une référence pour tous les pays qui veulent préserver la diversité culturelle, et qu’il vient d’être validé par la commission européenne pour les supports traditionnels.
L’une des clefs de la vitalité de notre production cinématographique et audiovisuelle réside dans le soutien qui lui est apporté par le COSIP géré par le Centre National de la Cinématographie (CNC). Celui-ci repose sur un principe fondamental : financer la production d’œuvres françaises ou européennes à valeur artistique, culturelle et patrimoniale, grâce à une contribution assise sur une assiette large incluant des programmes de tous genres et de toutes nationalités. En contrepartie de cette contribution à la production, les recettes perçues auprès des spectateurs ou téléspectateurs sont soumises à des taux réduits de TVA : 5,5%.
L’accès à des programmes attractifs, et notamment des films, ainsi que des dessins animés et des documentaires, constitue et sera de plus en plus un motif essentiel d’équipement à une offre par satellite, par câble, ou par Internet. C’est l’une des raisons pour lesquelles les distributeurs de services numériques, et notamment les fournisseurs d’accès à Internet, développent fortement leur activité et leur chiffre d’affaires.
Les plates-formes satellitaires, câblo-opérateurs, et fournisseurs d’accès à Internet, ne sont pas, actuellement, soumis à une contribution à la production. La réforme proposée par les parlementaires consiste donc à étendre la contribution au fonds de soutien. Elle ne porte pas sur les activités de réseau mais uniquement sur la distribution des services de télévision. Les distributeurs pourront donc bénéficier du taux de TVA réduit et aider ce nouveau secteur porteur d’avenir à se développer et à assurer son alimentation en œuvres européennes adaptées.
Je crois qu’affirmer que la réforme serait un nouvel impôt internet qui serait payé par les consommateurs est, tout simplement, de la désinformation, et ceux qui le disent oublient par ailleurs de mentionner qu’ils bénéficient d’un taux réduit de TVA. L’économie qu’ils réalisent grâce à ce taux réduit est bien supérieure à leur contribution au financement de la création.
Si l’on prend, par exemple, le cas de Free, initiateur de la pétition que vous avez signé, on constate que la TVA à taux réduit rapporte un montant bien supérieur à ce que devrait être sa contribution pour la création.
En effet, depuis 2004 Free bénéficie, sans aucune contrepartie, d’une TVA à 5,5% pour ses services de télévision. Le gain annuel pour Free sur la TVA est de 65,6 millions d’euros. Le gain total depuis cette date est donc supérieur à 130 millions d’euros.
Cet avantage fiscal rapporte à Free un montant bien supérieur à ce que devrait être sa contribution pour la création. En effet Free devrait contribuer au Cosip à hauteur de 7,4 millions d’euros.
Il faut abolir les dissymétries choquantes : il est légitime que Free comme tous les autres fournisseurs participe au financement de la création française en contrepartie de l’avantage fiscal dont il bénéficie.
La nouvelle assiette de cette contribution au compte de soutien, car il s’agit bien d’une nouvelle assiette et non d’une nouvelle taxe, respecte totalement le principe d’équité.
La totalité de cette recette sera affectée non pas aux secteurs traditionnels du fonds de soutien (cinéma, télévision) mais aux nouvelles aides à mettre au point en 2007 avec les bénéficiaires concernés. Les pistes d’ores et déjà à l’étude sont les suivantes :
* rendre éligibles aux aides du CNC les projets développés spécifiquement pour les nouveaux supports, * soutenir les productions multi-supports, les nouveaux formats, les écritures et projets innovants, * soutenir la numérisation des catalogues et l’éditorialisation des services de vidéo à la demande.
Les aides pourront passer par des fonds existants (Fonds innovation, Fonds d’aide à l’édition multimédias, Soutien sélectif à la vidéo) ou par la création de nouveaux fonds plus spécifiques.
Tels sont les éléments qu’il me semblait utile de vous communiquer à ce sujet avant que ne commence la discussion parlementaire sur ce texte.
Je vous prie de croire, Madame, Monsieur, à l’assurance de mes sentiments les meilleurs.
Jean-Michel DUBERNARD
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